Que fait un·e Head of Design de ses journées ? Est-ce que manager une équipe de designers autonomes ça occupe VRAIMENT à ce point tout le temps d’une personne ? D’ailleurs, si l’équipe est si autonome que ça, est-ce qu’on à ce point besoin de quelqu’un ? Et puis quelle valeur apporte un Head of Design, là où ce sont les équipes qui font le plus gros du boulot ? Ce sont des questions que je me suis beaucoup posé avant d’être confronté moi-même à ce rôle. Aujourd’hui j’ai l’expérience et le recul nécessaire pour vous apporter des éléments de réponses.
L’entièreté des efforts d’un·e Design Manager doit être concentrée à tirer un maximum d’impact de son équipe. Il s’agit d’avoir un effet multiplicateur sur les ressources qui vous sont confiées. On peut avoir une équipe la plus autonome possible, cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas leur faciliter la tâche. Les meilleurs Head of Design permettent à leurs équipe d’évoluer dans un environnement propice à l’accomplissement de la vision de différente manières :
- En s’assurant qu’elle a compris la mission de l’entreprise et qu’elle y adhère
- En développant les compétences de l’équipe
- En adoptant les bons outils
- En garantissant la meilleure utilisation des ressources
Développons tout ça…
Faire adhérer son équipe à la mission
S’assurer que tous les membres de l’équipe sont alignés avec la mission de l’entreprise est la base sur laquelle va reposer tout le travail que vous allez entreprendre. Une équipe compétente et bien outillée ne montrera le maximum de l’impact qu’elle peut avoir que si elle est motivée par un but commun.
Il y a peu de chances que les designers d’une équipe partagent exactement les mêmes aspirations. Certaines personnes sont motivées par les défis techniques, d’autres par la perspective d’améliorer la vie de vos utilisateurs ou par le sentiment d’évoluer dans la meilleure équipe possible…
Le rôle d’un manager est de traduire la mission de l’entreprise en autant de messages différent pour qu’il résonne au plus fort auprès des designers de l’équipe. Cela peut prendre la forme d’une vision produit matérialisée pour motiver les personnes à la recherche d’impact. Ou de présenter un plan de développement de l’équipe ambitieux, permettant d’atteindre cette vision et de rassurer ceux qui sont là pour devenir de meilleurs designers.
Développer les compétences de l’équipe
C’est la partie visible de l’iceberg, ce qui apparait comme étant le plus évident : un·e Design Manager doit développer les compétences de son équipe. Cela peut se faire de 2 façons différentes : en faisant progresser ses designers ou en intégrant de nouveaux talents par le recrutement. Mais avant d’entrer dans le détail de ces 2 activités, il est essentiel d’avoir une idée précise de ce que peut apporter chaque membre de l’équipe et de ce qu’il nous manque pour accomplir notre mission.
Cartographier précisément les compétences de son équipe peut être un exercice assez long en fonction du niveau de précision souhaité mais c’est un bon point de départ. Il est possible pour ça d’utiliser un career path, si vous en avez construit un. L’auto-évaluation est également un bon moyen d’avancer (en plus de pouvoir évaluer le “self-awareness” de votre équipe.
Une fois qu’on a fait ce travail, on peut commencer à faire progresser ses designers en imaginant plusieurs formats : les design critiques dont nous avons parlé précédemment est un bon moyen de le faire, mais il est également possible d’instaurer des sessions de pair-design ou d’organiser des workshops collectifs sur des sujets précis (prototypage, design system, research, …). Permettre à des designers seniors de mentorer des designers moins expérimentés a 2 effets bénéfiques : elle permet de développer les compétences des juniors, mais aussi le leadership des designers seniors.
C’est également le rôle du/de la Head of Design de trouver des opportunités de formation à l’extérieur de l’équipe. Cela peut-être en sollicitant d’autres équipes design, pour échanger des connaissances ou en faisant appel à des acteurs spécialisés (wink-wink)
Enfin, une équipe peut également se renforcer par le recrutement et c’est souvent à la personne en charge de l’équipe qu’il incombera de définir un process et des attentes. Mais pour que la piste recrutement fonctionne, il faudra également consacrer pas mal d’effort à la diffusion de ces offres et à rendre ces nouvelles opportunités attractives pour des designers (en participant à des meetups, des conférences, en intervenant dans des podcasts, etc.)
Adopter les bons outils
Que l'on me donne six heures pour couper un arbre, j'en passerai quatre à préparer ma hache — Abraham Lincoln
J’ai longtemps été assez désintéressé par toutes les discussions concernant le tooling, considérant souvent qu’une bonne discussion pouvait régler plus de problème qu’ajouter un énième outil ou process à notre arsenal. J’ai un peu fait machine arrière, me laissant convaincre qu’optimiser aussi la boite à outils de l’équipe pouvait être un bon catalyseur de leur impact.
Par “outils”, on entend évidemment tout ce qui est logiciel, plugin, etc. Mais cela comprend également les frameworks, process et rituels de l’équipe. Lors de mon expérience de Head of Design chez Heetch, nous avons constamment fait évoluer les formats de design critique, à la fois pour que les designers en tirent plus de valeur, mais aussi pour l’adapter à l’équipe qui a beaucoup changé.
C’est probablement une des facettes du rôle de Head of Design qui peut être le plus facilement délégué à l’équipe. Les plus “design geeks” de l’équipe peuvent consacrer une petite portion de leur temps pour explorer les nouvelles possibilités offertes par Figma, des outils de prototyping, de brainstorming ou de user research.
Garantir la meilleure utilisation des ressources
Pour garantir que les efforts d’une équipe seront transformés en le plus d’impact possible, il y a enfin d’autres aspects sur lesquels un·e design manager peut travailler :
- En jouant le rôle de paratonnerre et en protégeant son équipe des sollicitations externes pour leur permettre d’avoir un maximum de temps de concentration
- En travaillant avec les product managers et les développeurs pour s’entendre sur les attentes qu’ils ont envers les designers et pour fluidifier leur collaboration avec ces profils.
- En allouant les ressources design aux équipes/squads dans lesquels le design est facteur fort de réussite
Conclusion
La grande majorité de ce travail est souvent “invisible” aux yeux de tous mais les semaines des Head of Design sont finalement bien remplies. Il y a aussi beaucoup de croyances autour de l’idée que le rôle d’un manager est de se rendre “dispensable” et que le but ultime est que l’équipe puisse tourner toute seule. Il y a sans doute une part de vrai, mais ça serait un peu oublier l’idée qu’un manager est là pour amplifier l’impact qu’a son équipe.